L’e-Sport en France : opportunités et enjeux pour les médias – 26 avril 2017

Présentation de létude Médiamétrie réalisée en avril 2017 

avec Jamila Messaoud, Directeur des Départements Télécom, Equipement, Cinéma, Comportement Média et AdHoc 

Près de la moitié des internautes a déjà entendu parler du eSport et un tiers dentre eux est a consommateur » de contenu eSport. Fin avril, Médiamétrie a réalisé une étude ad hoc via internet auprès dun échantillon de 1000 internautes de 15 ans et plus. Les résultats de létude indiquent une forte notoriété de leSport auprès des personnes interrogées. En effet, 47% ont déjà entendu parler de leSport (vs 45% en octobre 2016). 33% ont déjà regardé une compétition deSport. Il sagit dun chiffre honorable en forte progression (vs 26% fin 2016). Les audiences de le Sport sont très bonnes sur Internet (5 millions de visiteurs uniques sur un mois). Il y a encore une marge de progression. Globalement, le profil de linternaute est plutôt masculin, jeune et actif (CSP+ et)

Un intérêt marqué pour les compétitions. LeSport est perçu comme un contenu de divertissement permettant de se détendre (53%), couvrir de nouveaux jeux (45%) et affiner sa stratégie de jeux (44%). Il est également apprécié pour ladrénaline (32%) et lémotion quil apporte (27%). 4 internautes sur 10 se disent intéressés par le contenu eSport (43%). Si lappétence est réelle, les catégories de jeu restent variables (stratégie, sport, combat etc.). Il est donc préférable de cibler linternaute en fonction de la catégorie de jeu quil préfère. L’intérêt à participer à une compétition en tant que spectateur est davantage marqué chez les initiés (42%)

Les canaux de diffusion privilégiés. Lécran du téléviseur arrive en tête (55%). Il est privilégié en raison de la qualité du son et de limage. Il est également choisi pour son côté « fédérateur >> : leSport est un contenu que lon aime partager. Les 1524 ans ont toutefois une préférence pour lordinateur. Sagissant des médias de diffusion : les chaînes TV sont en tête (47%) devant les sites web (40%) et les applis (12%). Les sites web devancent les chaines TV en termes dattentes chez certaines populations

Les contenus attendus : les compétitions en premier lieu. Les personnes interrogées sont avant tout intéressées par les contenus en live, notamment les compétitions (75%) ou les contenus annexes comme les interviews de joueurs ou autres acteurs de leSport (17%)

Les marques de jeu vidéo et de hightech plébiscitées. Les marques ou éditeurs de jeux vidéo sont les plus associés à leSport (73%). Les marques déquipement high tech sont également associées à cet univers (42%)

Table ronde avec Voyagessncf.com, Reed MIDEM, TF1 et Webedia

Avec

François Bitouzet, Chief Communications Officer, Voyagessncf.com Sarah Hemar, New Development Manager Entertainment, Reed MIDEM Julien Lecornu, Responsable Pôle Nouvelles Productions Digitales et MCN, TF1 Raoul Leibel, Directeur commercial Gaming/Esports, Webedia

I Quelle est lampleur du phénomène de leSport en France ? Il y a eu un réel engouement pour leSport en 2016. La France, aujourdhui en tête du classement des pays européens en termes dusages, est un véritable laboratoire. Pour Sarah Hémar, New Development Manager Entertainment au Reed MIDEM : « L’eSport cest plus que du gaming. Comme le dit Christophe Agnus de Vivendi, « lesport cest le Rockn Roll des Années 50, une véritable lame de fonds. Le phénomène est encore naissant mais se développe très vite »

LeSport a connu un vrai tournant grâce au jeu League of Legends. « Le futur de le Sport passera par FIFA, Clash Royale, des jeux qui ont une approche mainstream >> prédit François Bitouzet, Chief Communications Officer chez Voyagessncf.com. Nous sommes aujourdhui dans une phase de transition, avec un univers dans lequel évoluent les médias, les éditeurs de jeux et les marques. Mais il y a encore un an, le secteur en France était peu structuré, par comparaison avec les marchés asiatique et américain, plus en avance

Les projets à moyen terme se mettent en place progressivement, après un certain manque de professionnalisation en 2016, et de structure en 2017. Les choses 

commenceront à saccélérer fin 2017, début 2018, daprès Julien Lecornu, Responsable Pôle Nouvelles Productions Digitales et MCN, TF1. « Dans lensemble les jeux qui génèrent une forte audience sont très structurés. Les grands joueurs, les grands talents ont un vrai palmarès. Il y a une certaine récurrence dans les championnats et les palmarès. Les éditeurs de jeu ont intérêt à ce quon montre leurs produits, mais ils tiennent à mettre en place leur structure », précise Julien

Pour François Bitouzet, Chief Communications Officer chez Voyages SNCF, la problématique des éditeurs de jeux ne devrait pas être sousestimée : « Ces sociétés ont anticipé le potentiel de leSport et ne veulent pas que leurs contenus leur échappent. Elles préparent le terrain et lentrée sur le marché des gros acteurs traditionnels»

I Stratégies et retours dexpérience des participants 

Les ambitions de Webedia. Raoul Leibel, Directeur commercial Gaming/Esports chez Webedia a présenté le positionnement de sa société dans leSport: « Webedia a une 

stratégie de leader dans le secteur et ses ambitions sinscrivent à linternational. Historiquement, Webedia est positionné sur le jeu vidéo, avec une verticale dédiée au Gaming. La société a massivement investi en rachetant le site Jeuxvideo.com en 2014 (premier site en termes daudience Gaming en Europe) puis Millenium.org>. Avec la croissance de laudience dans leSport, Webedia a fait le pari dacquérir en septembre dernier la société Oxent, ayantdroit et producteur des événements ESWC, ainsi quune plateforme de gestion de tournois qui organise plus de 40 000 tournois par an dans plus de 100 pays. Parallèlement, Webedia a racheté Bang Bang Management, une société de gestion de talents issus de lunivers de leSport. La 

dernière brique associée est la création de la team PSG ESPORTS. « Avec lensemble de ces éléments, Webedia se positionne comme le premier acteur au monde qui intègre les composantes media, organisation de tournois, gestion de personnalités et olub », résume Raoul Leibel

Lapproche originale de TF1. Julien Lecornu, Responsable Pôle Nouvelles Productions Digitales et MCN, a présenté lapproche assez originale de MyTF1 Xtra. Il y a deux ans, TF1 a commencé à sintéresser à leSport. Un système dincubation a rapidement été mis en place : « Nous nous sommes associés à une dizaine de startups dans le cadre de notre programme dincubation. En 2016 avec Glory 4 Gamers, une start up spécialisée dans lorganisation de tournois amateurs en ligne, nous avons lancé XTRA Cup, une compétition tout public >>, explique Julien. Ces tournois organisés autour des jeux comme Hearthstone, League of Legends ou encore Overwatch ont notamment permis à des amateurs de rencontrer des professionnels. Deux autres tournois ont été organisés par la suite. « Nous allons continuer dans cette lancée et testerons un nouveau jeu tous les trois mois. Le prochain tournoi a lieu en mai avec la XTRA CUP ROCKET LEAGUE et sera suivi en Juin dun tournoi XTRA CUP CLASH ROYALE dont la finale se jouera sur le stand TF1 du salon Vivatech. Nous avons mis en place un plan de communication sur MyTF1. Nous avons aussi identifié des influenceurs qui contribuent à faire connaître lévènement. Beaucoup de joueurs sinscrivent, cest un vrai succès. Mais il ne faut pas oublier que cest aussi le cash prize qui intéresse les participants ». En parallèle de lorganisation de tournois, le second axe développé par TF1 porte sur la manière de construire et de capter une audience, et de produire une émission deSport. Cette année, la société GamersOrigin bénéficie de laccompagnement de TF1

Voyagessncf.com : une politique a feel good » daccompagnement des salariés. Pour Voyagessncf.com, la meilleure option nétait pas dapposer son logo dans lunivers de l’eSport. La société a pris conscience du nombre de collaborateurs passionnés. François Bitouzet, directeur de la Communication, décrit la manière dont lentreprise a fédéré ses salariés : « Nous avons créé une équipe constituée au départ de 17 personnes qui se retrouvent dans une gaming room mise à disposition. Nous prenons en charge les frais de déplacement et dinscription aux tournois, comme la Gamers Assembly ». Voyagessncf.com a par ailleurs mis en place un système de coaching en interne pour son équipe. Constituée dhommes et de femmes de 19 à 49 ans, la team casse limage un peu « geek >> du joueur. Les membres de léquipe sont conducteurs de train, guichetiers, développeurs etc. Ils ont tous pour point commun leur passion pour cette discipline. Les retours médias ont été très bons

Reed MIDEM, organisateur du premier évènement BtoB dans leSport. En étudiant le phénomène, Reed MIDEM sest passionné pour ce secteur et a décidé dorganiser en février dernier Esports BAR. Cet évènement de business international a réuni 115 personnes. « Pendant deux jours et demi, les teams, les Leagues, les éditeurs de jeu, les acteurs qui structurent leSport ont rencontré des marques média qui ont envie de sassocier au phénomène. Ils ont networké et participé à des rendezvous >> témoigne Sarah Hemar, New Development Manager Entertainment au Reed MIDEM. Pour Sarah Hemar, lune des particularités du secteur de leSport est quil est constitué de communautés très engagées et structurées qui interagissent tout le temps. Elle relève toutefois que « lagilité de leSport nest pas toujours en phase avec le manque dagilité de certaines agences ou marques. Mais Facebook, YouTube et Twitter y voient leur avenir »

| Quelles stratégies de partenariat avec les annonceurs et les marques Média

De prime abord, leSport peut apparaître comme un univers assez complexe. François Bitouzet de Voyagessncf.com a apporté le point de vue dun annonceur: « Les millennials sont une population difficile à atteindre. Il y a donc un vrai enjeu marketing et business. Pour un annonceur, la pérennité dun champion est un aussi 

vrai enjeu quand il sagit dapposer un logo sur son tshirt. Le potentiel énorme annoncé pour leSport fait quaujourdhui on demande aux annonceurs des tarifs importants, qui peuvent déjà permettre de faire des choses intéressantes dans des sports plus classiques. Il y a donc un arbitrage à faire»

Le positionnement difficile des acteurs du Betting a été évoqué au cours des échanges. Leur intérêt pour le secteur parait compréhensible daprès Raoul Leibel de Webedia : « La mécanique de leSport reste assez proche de celle des autres sports. De manière générale, la conception du pari est naturelle dès lors quil y a un affrontement entre deux équipes. Beaucoup de matchs sont pariés à létranger >

La complexité du paysage de leSport est accentuée par le fait que de nouveaux jeux et de nouvelles compétitions sont régulièrement lancés. Julien Lecornu, Responsable Pôle Nouvelles Productions Digitales et MCN, TF1, perçoit également un manque de visibilité mais reconnait toutefois que certains jeux sont structurés. Il donne quelques précisions sur la stratégie de sa chaine, qui a fait le choix de déployer son produit XTRA CUP sur toutes les plateformes (MYTF1, TWITCH, YOUTUBE GAMING...) sous une marque unique « MYTF1 XTRA ». Les valeurs portées par leSport sont positives et depuis 2016, nous avons ressenti un vrai intérêt de la part des annonceurs à sassocier à cet univers. Aujourdhui, il sagit essentiellement de marques digitales qui sont prêtes à parrainer ou sponsoriser les compétitions mais cest en train dévoluer »

De lavis général des participants à la table ronde, lintérêt des marques médias pour leSport est réel. Si laudience reste à construire, elle présente un vrai potentiel. Pour François Bitouzet de Voyagessncf.com : «Un annonceur peut tout à fait raconter une histoire dans un tel environnement, souple et ouvert. Il peut inventer de nouvelles manières dinteragir avec la marque. Le tailor made est assez simple dans lunivers du digital et la nouvelle génération de décisionnaires est née avec le jeu vidéo »

Raoul Leibel de Webedia estime également que leSport présente un vrai potentiel pour un annonceur : « On voit tous les jours arriver de nouveaux annonceurs, mais il ne sagit en aucun cas de faire de le-Sport pour faire de leSport. LeSport est un univers adéquat pour une marque qui communique sur une cible Homme de 1525 ans. Les annonceurs sont aussi exigeants dans le secteur de leSport que dans un autre secteur, et tout est calculable en termes de ROI. On est dans un secteur avec une croissance très forte mais qui part de loin

L’avis des participants a également été recueilli sagissant de leur perception de lencadrement juridique de leSport par la Loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique dite Loi Lemaire. Daprès Raoul Leibel « La popularité de leSport atteindra celle du football dans 10 ans. Un cadre légal pour les compétitions et le statut des joueurs permettrait déviter des dérives »